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Introduction à la musique de Birtwistle
par David Beard

L’oeuvre de Harrison Birtwistle reflète une vision profondément personnelle du monde dans laquelle différents degrés de complexité musicale croisent l’acquis de chacun par le biais de métaphores invoquant le voyage, le rite ou les multiples perspectives envisagées d’un même objet. Quoiqu’influencée, à des niveaux divers, par Stravinsky, Messiaen, Boulez et Cage, son style distinctif se caractérise par le recours à l’alternance de cuivres et de percussion, par de larges mélodies évoluant librement sur fond mécanisé et par des pulsations changeantes remettant en question la capacité individuelle de perception et de mesure du temps. Les textures peuvent se superposer en un ensemble sonore dense dont surgissent des voix isolées en fanfare ou sur un pas de danse. En d’autres termes, la musique de Birtwistle s’ancre fermement dans le ressenti corporel, ce qui, étant donné sa première expérience de théâtre musical à Accrington en tant que clarinettiste et saxophoniste dans la fosse d’orchestre et ses fonctions de directeur de la musique exercées de 1975 à 1983 au London National Theatre, ne saurait surprendre.

Ses principales oeuvres des années 1960, parmi lesquelles Tragoedia, Verses for Ensembles, son premier opéra Punch and Judy ainsi que les Earth Dances orchestrales – son « Sacre du Printemps » – sont musclées et extroverties, dans la lignée de Stravinsky. Toutefois, Birtwistle dévoile également son côté introspectif intériorisé dans l’expérimentation technique, le lyrisme contenu ou la sombre mélancolie émanant d’oeuvres telles que The Corridor, essai de théâtre expérimental sur la perte d’Eurydice par Orphée impliquant une série de lamentations de plus en plus pressantes, The Shadow of Night et Night’s Black Bird, oeuvres orchestrales sombrement évocatrices à la progression inquiétante, les Three Latin Motets éthérés pour choeur a capella extraits de l’opéra The Last Supper, ainsi que du dialogue en style jazz à la mécanique à la fois complexe et nuancée entre piano et percussion de The Axe Manual, de la finesse acérée de Crowd pour harpe solo et de la montée parfaitement contrôlée dans le temps de la tension précédant l’apparition du Minotaure de son récent opéra The Minotaur.

Tout en maintenant une remarquable cohérence de sa vision musicale, la production la plus récente de Birtwistle révèle des signes fascinants d’un style « tardif », dont l’un des plus évidents est un nouvel attrait pour les cordes, alors que ses préférences précédentes se tournaient vers les instruments à vent et la percussion. Le Violin Concerto, rappelant The Minotaur et le saxophone soliste de Panic, possède une énergie frénétique contrebalancée par des moments de méditation songeuse. Les configurations en style de fantaisie et les frises pour quatuor à cordes de Pulse Shadows – oeuvre-clé mettant en musique des poèmes sur l’Holocauste de Paul Celan – déploient un enchevêtrement éminemment élaboré. Bogenstrich and Trio exploite, quoique selon les termes singuliers de Birtwistle, la forme de la fugue ainsi que des timbres de cordes étonnamment romantiques. Ses arrangements de fugues de Bach pour quatuor à cordes confirment également une reconsidération de technique : le magistral String Quartet : The Tree of Strings, rustique et poignant, évoque la profonde relation de Birtwistle avec le paysage naturel qui fait écho à des compositeurs britanniques antérieurs. Tout en développant des thèmes, tels que l’inséparabilité de l’humain ou du matériel et du divin, approfondie dans le livret de Robin Blaser pour The Last Supper et revisitée dans Angel Fighter et The Moth Requiem, Birtwistle repense certaines de ses réalisations préalables comme dans In Broken Images, extraordinaire oeuvre d’ensemble inspirée par les procédés antiphonaires de Giovanni Gabrieli dans laquelle les éclats du passé du compositeur sont éclairés d’une lumière simultanément provocatrice et stimulante, brisée et éternellement régénératrice.

David Beard, 2012
(Senior Lecturer en Musique de l’Université de Cardiff; auteur de Harrison Birtwistle’s Operas and Music Theatre, Cambridge University Press, 2012 ; co-auteur de Musicology : the Key Concepts, Routledge, 2005)

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